Metformine : un médicament prometteur pour bien vieillir… ou pas ?

Metformine : un médicament prometteur pour bien vieillir… ou pas ?

Par Pr Eric BOULANGER - Directeur médical du programme tempoforme® 
Avril 2025

Avec l’allongement de l’espérance de vie, une nouvelle question s’impose à chacune et chacun d’entre nous : comment vieillir en bonne santé ? Plus précisément, comment conserver sa mobilité, son autonomie et sa qualité de vie, même après 70, 75 ou 80 ans ?

Dans ce contexte, les chercheurs s’intéressent de plus en plus à la fragilité et à la sarcopénie, deux processus liés à l’âge. L’une des pistes explorées pour les prévenir ou les ralentir est l’utilisation de traitements dits géroprotecteurs. Autrement dit, des médicaments qui pourraient agir sur les mécanismes biologiques du vieillissement.

Parmi eux, un nom revient régulièrement : la metformine. Déjà utilisée depuis longtemps dans le traitement du diabète de type 2, elle est aujourd’hui étudiée pour ses effets potentiels sur la longévité et la santé musculaire.

Mais qu’en est-il vraiment ? Peut-elle réellement aider les personnes à préserver leur forme physique en avançant dans l’âge ? C’est ce qu’a voulu savoir l’équipe de chercheurs du projet MET-PREVENT, à travers une étude rigoureuse menée au Royaume-Uni. Voici un résumé d’une recherche aussi attendue qu’instructive.

Fragilité et sarcopénie : des ennemis silencieux, mais réversibles

La fragilité est un état de vulnérabilité fonctionnelle du vieillissement entre la robustesse et la dépendance.

Ce n’est ni une maladie, ni un concept théorique, mais un signal d’alerte de perte en réserves et en capacités d’adaptation au quotidien.

Contrairement à la dépendance, qui s’installe durablement et ne se corrige plus, la fragilité est un état réversible sur lequel on peut agir.

La pré-fragilité est une forme plus précoce et plus légère que la fragilité et doit être considérée comme un retour encore plus facile vers la robustesse, à condition d’agir le plus tôt possible.

Il y a donc un réel intérêt à repérer ces signaux faibles le plus tôt possible.

La sarcopénie, elle, désigne spécifiquement la perte de masse et de force musculaire liée à l’âge. Elle est souvent présente chez les personnes fragiles et contribue à cette spirale de déclin fonctionnel.

Ces états ont des conséquences concrètes : plus de chutes, une autonomie réduite, un risque accru d’hospitalisations et parfois d’entrée en dépendance plus rapide.

Si l’exercice physique et une alimentation adaptée restent les piliers de la prévention, certains scientifiques se sont demandé si des médicaments pourraient renforcer cette approche.

Parmi eux, la metformine s’est imposée comme un candidat crédible.

Si un médicament pouvait renforcer la musculature et ralentir cette spirale, ce serait une révolution.

Seringue

La metformine : un espoir justifié chez des personnes âgées fragiles ?

On peut se demander pourquoi la metformine suscite autant d’intérêt.

Une des raisons est qu’elle agit sur plusieurs mécanismes liés au vieillissement cellulaire. En effet, elle modulerait l’inflammation, améliorerait la fonction mitochondriale (ces petites usines de production d’énergie dans nos cellules), freinerait certaines voies de dégradation musculaire et agirait même sur le microbiote intestinal. Elle est donc considérée par certains comme un géroprotecteur potentiel.

Des études précédentes ont montré des effets encourageants chez des personnes âgées sans fragilité : amélioration de la marche, meilleure fonction musculaire… mais d’autres résultats ont été contradictoires, voire décevants.

C’est dans ce contexte que l’étude MET-PREVENT a été lancée au Royaume-Uni. Elle a consisté en un suivi pendant 4 mois de 72 personnes âgées de 65 ans et plus, toutes atteintes de pré-fragilité ou fragilité et présentant des signes de sarcopénie probable (faible force de serrage ou difficulté à se lever d’une chaise cinq fois de suite, deux indicateurs utilisés pour détecter la sarcopénie.).

Un critère important était pris en compte pour l’inclusion de ces personnes dans l’étude : leur vitesse de marche sur 4 mètres était inférieure à 0,8 mètre/seconde, un seuil considéré comme critique.

Les participants ont été répartis en deux groupes au hasard et en aveugle :

  • l’un a reçu de la metformine (500 mg trois fois par jour) ;
  • l’autre un placebo (un comprimé de même apparence mais sans effet).

Le traitement a duré 4 mois.

Le principal critère d’évaluation était d’analyser si les personnes sous metformine marchaient plus vite sur une distance de 4 mètres au bout de 4 mois que celle recevant le placebo. D’autres paramètres ont été analysés : force musculaire, qualité de vie, autonomie, événements indésirables, etc.

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Des résultats décevants, mais instructifs

Les résultats sont sans appel : aucune amélioration significative n’a été observée dans le groupe qui a reçu la metformine. La vitesse de marche est restée globalement identique à celle du groupe placebo. Idem pour la force de préhension, la performance physique globale ou les scores d’autonomie.

Pire encore : le traitement a été mal toléré. Près de 40 % des participants sous metformine ont arrêté le traitement en cours de route, en raison d’effets secondaires (nausées, diarrhée ou troubles digestifs).

Le groupe metformine a aussi connu plus d’hospitalisations (12 contre 3 dans le groupe placebo) et un nombre plus élevé d’effets indésirables. Ceci dit, le fait que des participants ayant reçu un placebo ont déclaré avoir eu des évènements indésirables avec leur traitement peut paraître étonnant…

Ces résultats suggèrent en tout cas que la metformine, à cette dose et dans cette population fragile, n’est pas un traitement efficace ni sûr pour améliorer la performance physique.

Cela ne veut pas dire qu’elle n’a aucun effet dans d’autres contextes, mais chez les personnes âgées déjà fragilisées, les bénéfices ne semblent pas au rendez-vous sur 4 mois.

L’étude MET-PREVENT invite à la prudence face aux solutions présentées comme miraculeuses dans le domaine du vieillissement. Même un médicament bien connu comme la metformine peut avoir des effets délétères s’il est mal ciblé.

Et ce n’est pas une mauvaise nouvelle en soi. Car vieillir en bonne santé est loin d’être une affaire de médicaments. C’est surtout une question de prévention active.

Et pour cela, nous disposons déjà de leviers simples, efficaces et accessibles : activité physique régulière, alimentation équilibrée et riche en protéines et suivi régulier de notre état fonctionnel.

Repérer les premiers signes de pré-fragilité permet bien souvent d’inverser la tendance avant que la dépendance ne s’installe. Mais encore faut-il savoir où l’on en est.

C’est là que l’auto-évaluation prend tout son sens. Avec l’application gratuite tempoforme®, vous pouvez facilement évaluer votre statut : robuste, pré-fragile ou fragile.

En quelques minutes, vous obtenez un document à partager avec votre médecin pour envisager des actions concrètes. Et si besoin, vous pouvez aller plus loin avec un bilan approfondi au sein d’un espace dédié au bien vieillir.

Parce qu’il n’est jamais trop tôt pour bien vieillir. Et jamais trop tard pour reprendre la main.

 

Lien vers l’article : Article The Lancet

 

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