COVID-19 et risque de démence : une menace silencieuse pour notre cerveau ?

COVID-19 et risque de démence : une menace silencieuse pour notre cerveau ?

Par Pr Eric BOULANGER - Directeur médical du programme tempoforme® 
Mars 2025

Depuis son apparition, la COVID-19 a bouleversé notre vision des maladies infectieuses. Si les conséquences sur le système respiratoire et cardiovasculaire ont largement été étudiées, son impact sur le cerveau demeure moins connu du grand public.

Pourtant, une récente méta-analyse menée sur plus de 26 millions de patients révèle un constat préoccupant : les personnes ayant contracté la COVID-19 présentent un risque accru de développer une démence dans les mois et années qui suivent l’infection.

Ce lien entre COVID-19 et déclin cognitif mérite toute notre attention. Quels sont les mécanismes en jeu ? Qui est le plus à risque ? Et surtout, comment prévenir cette évolution inquiétante ? 


Cet article décrypte les résultats de cette étude et leurs implications pour le bien vieillir.

 

COVID-19 et cerveau : un lien inquiétant mis en évidence

Le coronavirus ne se limite pas aux poumons. Dès les premiers mois de la pandémie en 2020, des symptômes neurologiques comme la perte d’odorat, des maux de tête, des vertiges ou encore des troubles cognitifs ont été signalés par de nombreux patients.

Mais au-delà de ces manifestations aiguës, des chercheurs ont voulu savoir si le virus pouvait avoir des conséquences à plus long terme sur le cerveau.

C’est ce qu’a tenté de savoir cette méta-analyse, en regroupant les données de 15 études internationales comparant des patients infectés par la COVID-19 à ceux qui ne l’avaient pas été.

Les résultats montrent que les personnes ayant contracté le virus sont plus susceptibles de développer une démence que celles qui ne l’ont pas eue, avec une augmentation estimée à 49 % du risque.

Concrètement, cela signifie que, parmi les personnes infectées, le risque est environ 1,5 fois plus élevé.

Et cette augmentation du risque ne touche pas uniquement les personnes âgées. Même si les plus de 65 ans sont les plus vulnérables, l’étude montre que ce risque est également présent chez les adultes plus jeunes et dépend d’autres facteurs que l’âge.

Il s’agit donc d’un enjeu de santé publique qui concerne l’ensemble de la population.

Pourquoi la COVID-19 augmente-t-elle le risque de démence ?

Les chercheurs avancent plusieurs hypothèses pour expliquer ce lien entre infection et déclin cognitif.

L’inflammation cérébrale et les dommages neuronaux

Lorsque le corps lutte contre une infection virale comme celle de la COVID-19, il génère une réponse inflammatoire.

Si cette réponse devient excessive ou prolongée, elle peut endommager les tissus cérébraux. En particulier, l'inflammation peut altérer la structure et le fonctionnement des neurones et accélérer ainsi les processus neurodégénératifs, tels que ceux observés dans la maladie d'Alzheimer.

Le coronavirus semble favoriser ce type d’inflammation, ce qui pourrait endommager des régions cérébrales clés liées à la mémoire et aux capacités cognitives.

Les troubles vasculaires

Le virus n’infecte pas seulement les cellules du système nerveux, il peut également affecter la circulation sanguine.

En perturbant le fonctionnement des vaisseaux sanguins, la COVID-19 peut provoquer des troubles vasculaires cérébraux, comme des mini-AVC ou des micro-saignements dans le cerveau.

Ces troubles vasculaires sont des facteurs de risque bien connus pour le développement de démence, car un apport sanguin insuffisant aux cellules cérébrales peut entraîner une dégradation progressive de leurs fonctions.

L’impact des formes sévères de la COVID-19

Les patients ayant développé une forme grave de la COVID-19, nécessitant une hospitalisation ou des soins en réanimation, paraissent courir un risque supérieur de déclin cognitif.

L’hypoxie (manque d'oxygène) et les traitements intenses, comme l’utilisation d’appareils de ventilation, peuvent avoir un effet délétère sur le cerveau. De plus, les périodes prolongées d’alitement ou d’immobilisation associées à une hospitalisation longue peuvent aussi affecter les capacités cognitives à court et à long terme.

Ces facteurs cumulés créent un environnement propice à l’apparition de troubles cognitifs persistants, voire à une démence.

Les groupes les plus à risque et l'importance de la prévention

Bien que l’étude montre un risque accru pour l’ensemble de la population, certains groupes sont plus vulnérables que d'autres.

Les personnes âgées de plus de 65 ans sont particulièrement touchées par cette augmentation du risque de démence après une infection à la COVID-19. Cependant, les adultes plus jeunes, en particulier ceux présentant des pathologies comme un diabète, une obésité ou une hypertension, sont également concernés.

La prévention et un suivi rigoureux après une infection à la COVID-19 deviennent donc des enjeux essentiels pour préserver la santé cognitive.

Que ce soit pour les jeunes ou les plus âgés, plusieurs stratégies peuvent être adoptées pour limiter les risques :

  • Le suivi médical  

Après une infection à la COVID-19, il est essentiel de suivre l'évolution de sa santé cognitive. Un suivi médical régulier permet de détecter les premiers signes de déclin cognitif et de mettre en place des actions adaptées pour ralentir son évolution.

Un geste simple pourrait aussi contribuer à protéger votre cerveau : la vaccination contre la grippe. Une raison de plus pour ne pas négliger cette protection chaque année.
 

  • L'activité physique régulière   

L’exercice physique est reconnu pour ses bienfaits sur la santé cérébrale. Il améliore la circulation sanguine, stimule la production de nouvelles cellules cérébrales et renforce les connexions neuronales.

Il est donc crucial d’incorporer des activités physiques modérées, telles que la marche, le yoga ou la natation, dans son quotidien.
 

  • L'alimentation équilibrée    

Une alimentation riche en antioxydants, en oméga-3, en vitamines B, C, D et E, ainsi qu’en minéraux comme le zinc et le fer, soutient la santé du cerveau et le bien-être mental. On les trouve dans les poissons gras, les noix, les graines, les légumineuses, les fruits et légumes colorés, ainsi que les céréales complètes.

Plus qu’un simple effet isolé, c’est l’équilibre global de l’alimentation qui favorise des fonctions cognitives optimales et réduit l’inflammation.

 

  • Stimulation cognitive et sociale    

Participer à des activités qui sollicitent le cerveau, comme la lecture, les jeux de réflexion ou l’apprentissage de nouvelles compétences, peut aider à maintenir ses facultés cognitives.

De même, entretenir des relations sociales et maintenir des interactions régulières avec son entourage joue un rôle clé dans la prévention du déclin cognitif.
 

L’étude qui lie la COVID-19 au risque augmenté de démence représente un signal d’alarme. Elle nous rappelle que la santé cérébrale, souvent négligée au profit de la santé physique, mérite toute notre attention, surtout après une infection virale.

Si l’infection à la COVID-19 nous a montré ses dangers pour le cerveau, elle nous rappelle aussi que nous avons le pouvoir d’agir pour protéger notre santé cognitive.

Vieillir en bonne santé, c’est aussi prendre soin de son cerveau, en adoptant des comportements favorables à sa longévité et en restant attentif aux signes de fragilité cognitive. La prévention doit commencer dès aujourd'hui, car chaque geste compte pour garder notre cerveau en forme le plus longtemps possible.

Bien que les implications de cette recherche paraissent préoccupantes, elles offrent aussi une opportunité d’agir en amont pour limiter les risques.

En adoptant une approche proactive, chacun peut contribuer à préserver sa santé globale et maintenir sa qualité de vie, même face aux défis posés par des infections telles que la COVID-19.

 

Lien vers l’article :
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/40037563/

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